SOIXANTE-DIX-SEPT FOIS "Pardonnez et vous serez pardonnés" (Lc 6,37) 2 SITUATIONS DIFFERENTES Les situations où l'on peut pardonner sont infinies et très différentes. Et si je pardonne en étant conscient que Jésus Pardonne avec moi, ou si je pardonne par amour pour Jésus, alors il peut arriver qu'avec celui qui est pardonné puisse naître une union plus forte, plus intime, véritable gloire de Dieu. J'ai fait cette expérience. Du pardon accordé par amour pour Jésus naît un rapport plus profond et plus spirituel. C'est une expérience que j'aimerais que tout le monde puisse faire, surtout les couples et les personnes qui vivent et travaillent ensemble pour le Royaume de Dieu, dans les communautés ou les groupes ecclésiaux. En vivant ensemble en famille ou en communauté, on a quotidiennement l'occasion de demander pardon ou de pardonner! En vivant ensemble, même les petites choses faites ou dites par manque d'harmonie amènent la souffrance. Demander pardon? Oui! Pardonner? Oui! Demander pardon sans se justifier et sans attribuer des fautes aux autres, pardonner sans demander des explications ou des promesses. Seule condition: faire ceci au nom de Jésus! Prononcer explicitement ce Nom car chaque péché fait tressaillir le coeur du Fils de Dieu, mort pour les péchés, et chaque pardon accordé le fait exulter car il glorifie sa Résurrection: "Je te demande pardon au Nom de Jésus" "Je te pardonne au Nom de Jésus". Lorsque les péchés, même les plus graves, sont entourés par le Nom de Jésus prononcé à haute voix, ils ne pèseront plus et ils cesseront de répandre la méfiance et la tristesse. Il y a des personnes qui n'arrivent pas a demander pardon: elles n'ont jamais été aidées, elles n'ont pas une connaissance de Dieu et un intérêt à son Règne tellement profond! Peut-être confessent-elles leurs péchés au prêtre sans penser devoir faire autre chose. Je peux pardonner ces personnes aussi. Je leur fait sentir par mon comportement, mon salut, mon regard qu'il y a de l'amour pour elles dans mon cœur. Leur péché ne m'a pas offensé, leur tort ne m'a pas effrayé car il ne m'a pas empêché de rester dans l'amour du Père. Ce sont elles qui ont subi un endommagement spirituel par l'offense qu'elles m'ont faite. Je les aime et je prie pour elles pour que leur union à Dieu, qui s'était gâtée, puisse se rétablir. Par l'amour nous recouvrons une multitude de péchés! Il y a des personnes qui ne demanderont jamais pardon. Elles ne savent pas qu'il existe, ou bien elles sont orgueilleuses , ou elles s'estiment supérieures aux autres, ou bien elles croient avoir toujours raison. Pratiquement, elles ne croient pas en Dieu, elles ne l'aiment pas, elles ne cherchent pas ce qui Lui plait. Elles n'acceptent pas d'être pardonnées parce que cela signifierait admettre d'avoir commis une faute, d'avoir péché. Cela crée une situation difficile, très mauvaise, douloureuse. Comment faire? Même envers ces personnes je fais ce que fait le Père. Je garde mon coeur disponible au pardon. Je désire pour elles qu'elles rencontrent Jésus, seule lueur à la splendeur de laquelle les hommes peuvent voir leur péché. Je désire pour elles la libération du mal et je la demande au Père comme le Seigneur a fait sur la Croix: "Père, pardonne-les: ils ne savent pas ce qu'ils font". Il y a des personnes qui ont péché contre nous par suite d'un péché à
nous. Nous-mêmes les avons provoquées avec nos paroles et nos actions.
Alors c'est évident: c'est à nous de nous humilier et de demander pardon
pour notre manque d'amour si petit soit-il par rapport à ce qui nous a
été rendu! Ou bien nous avons réagi à une offense par un autre offense.
Est-ce que nous devons attendre que ce soit l'autre qui nous demande pardon
par le fait que c'est lui qui a commencé à faire du mal? Il y a des personnes qui nous ont attiré à faire le mal. Doit-on pardonner à elles aussi? Oui, certainement. Cela ne veut pas dire de retourner à avoir avec elles la même confiance qu'avant. Si celui qui m'a attiré au mal ne s'est pas converti, je lui pardonne mais je tâche d'éviter l'occasion de me laisser encore tromper et entraîner au péché. Si quelqu'un m'a offensé en révélant mes secrets, je pardonne mais je me garderai bien de lui en confier d'autres. Pardonner ce n'est pas aimer sans discernement, sans vigilance et sans prudence spirituelle. Je pardonne mais je ne réussis pas à oublier. Je ne réussis pas à oublier l'offense reçue. Souvent la mémoire empêche l'amour. Et bien en ce cas je te dis: il n' y a pas besoin d'oublier. Lorsque tu te rappelles l'offense, remercie Dieu le Père qui t'a fait la grâce d'avoir déjà pardonné. Remercie le Père qui a pris au sérieux le pardon que tu as prononcé. Reviens fixer tes yeux sur Jésus, mort pour tous, même pour celui qui t'a offensé, et exprime le désir que l'oeuvre de Jésus, ton ami, se complète même en tes "ennemis". Petit à petit ta mémoire se remplissant du souvenir de l'amour de Jésus,
se videra du souvenir de tes souffrances!
Joseph, fils de Jacob, a dû souffrir beaucoup à cause du péché de ses
frères qui l'ont vendu comme esclave. Sa vie et celle de son père ont
été gâchées. Ceci ne lui a pas empêché d'être fidèle à Dieu dans les situations
de tentation dans lesquelles il s'est trouvé. Nous commencerons à être reconnaissants même pour ce que nous ne comprenons
pas, même pour ce qui nous fait souffrir, même pour les offenses qui nous
sont adressées.
Des voix diverses informent ... que beaucoup de maladies psychiques et
psychosomatiques et même physiques dépendent du fait que les hommes vivent
sans pardonner est sans être pardonnés. C'est un avertissement auquel
il est facile de croire. Pardonner tout le passé. Comment faire? Passe en revue toute ta vie avec ces mots dans le coeur: "Au nom de Jésus, pour l'amour de Jésus, avec Lui, je pardonne ... les manques d'attention et d'amour (vrais ou supposés) de mes parents, entre eux et à mon égard, les jalousies et les disputes de mes frères, les envies et les violences des amis d'enfance, les inimitiés entre familles des voisins, les malédictions reçues, les injustices des enseignants, les incompréhensions du curé, les coups de n'importe qui, les révélations sexuelles faites malicieusement, les contraintes de tout genre, les murmures et les calomnies, les jalousies de mes beaux-parents, de mes gendres et belles-filles, les trahisons des frères des parents ou des fils, les pertes subies dans le partage de l'héritage..." Que de choses à pardonner! Tout le monde semble être coupable envers moi. Je pardonne au nom de Jésus: je ne veux pas rester sous l'emprise du mal, mais je veux répondre au mal par l'amour: je pardonne! Ainsi je commence à sauver le monde coupable parce que je verse sur lui un fleuve de grâce, celui jailli du Coeur transpercé de Jésus-Christ! J'accomplis la même opération en pensant au présent, à ce qui m'arrive
à présent: Je pardonne, je pardonne à celui qui ne m'aime pas, je pardonne
à celui qui me flatte, je pardonne à celui qui ment, je pardonne à celui
qui me méprise, je pardonne à celui qui me tend des pièges, je pardonne
à ceux qui détruisent le monde où je vis, je pardonne au gouvernement,
je pardonne au parlement, je pardonne aux persécuteurs de l'Eglise, je
pardonne, je pardonne... Oui, je veux, de mon côté, leur pardonner si l'âme de quelqu'un d'eux ait besoin du pardon. A travers le Seigneur Jésus il existe un rapport des âmes des défunts
avec nous. Je ne veux pas formuler des suppositions sur les modes de ce
rapport: il me suffit de savoir que Dieu le connaît et peut tellement
le remplir que je ne doive ni m'exalter, ni m'effrayer, ni désirer connaître.
Jésus a souvent parlé de pardonner. Il nous a dit qu'il est nécessaire
de pardonner si nous voulons être écouté par Dieu dans la prière. Il faut
pardonner pour ressembler à Dieu, pour être en mesure de recevoir à notre
tour son pardon; de nombreuses paraboles ont ce sujet. La contemplation de Dieu est nécessaire, elle est à l'origine de notre capacité de pardonner. Et notre pardon nous ouvre à la communion avec Dieu devant lequel nous sommes,bien sûr,toujours et tous les jours des pécheurs.
Nous, fils de Dieu, nous ne devons pas nous associer à l'accusateur de nos frères "qui a été précipité" (Ap 2,10). Si nous trouvons un frère qui pèche contre Dieu et contre nous, nous ne voulons ni accuser, ni juger, ni condamner. Nous voulons le sauver du "lion qui rôde cherchant qui dévorer" (1 Pt 5-8). Nous voulons collaborer avec Dieu dans l'oeuvre du Salut, collaborer
avec Jésus qui a versé son sang "pour la rémission des péchés".
Ainsi nous deviendrons incapables de médire quelqu'un. Lorsque Caïn tua son frère, Dieu est sorti , il est sorti pour le retrouver, pour lui redonner l'amour perdu. Et, bien qu'il n'ait pas réussi immédiatement, il a continué à le protéger, il ne 1 'a pas abandonné. Pourrait-tu médire Caïn en sachant que Dieu le cherche et le suit avec ses pas d'amour? Ecoutons encore cette déclaration de Jésus: "Aimez vos ennemis et priez pour vos persécuteurs afin de devenir fils de notre Père qui est aux cieux car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. Soyez donc parfaits comme votre Père céleste est parfait" (Mt 5,44s-48). Si nous aimons jusqu'à pardonner, nous devenons donc parfaits de la même perfection de Dieu! La façon de devenir ses fils, d'être reconnus par Lui comme les siens c'est le pardon! Merci, mon frère, pour chaque fois que tu m'a pardonné; |
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