JE VAIS A LA MESSE 3

LA VIE DANS LE PAIN

Je ne sais pas comment commenter la partie centrale de la Messe, celle de la Consécration. Si j'essaie d'expliquer mot par mot je n'en finis plus. Si je veux être complet je dois me taire tout à fait car un homme ne peut comprendre pleinement le mystère que nous célébrons et moi moins encore car non seulement je suis un homme, mais je suis aussi un grand pécheur.
Parfois Dieu me fait la grâce de comprendre quelque chose dans ses intentions à l'égard de l'Eucharistie mais c'est comme un éclair qui disparaît subitement en laissant toutefois la certitude de sa lueur et une joie profonde du mystère.
Pourtant, puisque je me suis embarqué dans cet exploit de vous commenter la Messe, j'essaie de balbutier ce dont je suis capable.
Jésus a attendu trois ans avant d'admettre ses apôtres, ses amis les plus intimes, à observer avec étonnement et à jouir en inconscients de ce moment que nous connaissons comme la dernière Cène.
Ils n'étaient pas plus saints que nous et il ne le sont pas devenus ce soir-là (ceci me console quand on me fait remarquer que celui qui va à la Messe, et moi-même j'y vais, reste un pêcheur). Qu'auront compris les apôtres? Rien peut-être et cependant pour eux cette expérience-là a été déterminante. Ils avaient souvent mangé avec Jésus. Mais manger du pain sur lequel avaient été prononcées des paroles nouvelles c'était vraiment une nouveauté surtout parce que ces paroles n'étaient pas mystérieuses tout en cachant un mystère. "Prenez et mangez-en tous: ceci est mon corps donné en sacrifice pour vous".
Ce pain, dans l'intention de Jésus et dans ses mains, n'est plus de la farine pétrie avec de l'eau et cuite pour des estomacs vides, ce pain cl est le corps -la vie, l'existence, la présence que Dieu lui avait donné et qu'Il avait offert à son Père. Le Corps du Fils de Dieu!
Une parole avait suffi à Dieu pour créer l'univers et pour donner la vie au premier des hommes e chair; une parole de son Fils suffit à Dieu pour donner à un morceau de pain une nouvelle signification ainsi qu'une nouvelle consistance.

Une nouvelle création se produit. La Parole de Dieu crée. Ce qui m'étonne et qui pourtant est sage, saint et beau c'est que cette Parole de Dieu puisse aujourd'hui sortir de mes lèvres et se poser sur un peu de pain qui est déjà là tout prêt. Cela m'étonne car moi je suis ce que je suis, le pain est ce qu'il est et Dieu pourrait faire davantage et mieux; mais il me semble savant et beau que Dieu se serve de sa création rebelle et déchue, faite de matière qui se corrompt, pour l'œuvre la plus grande qui existe, pour une oeuvre tellement spirituelle qui touche et "l'emprisonne" Dieu-même. Ainsi ce pain non seulement change de valeur mais aussi mes main-à qui le touchent, mes lèvres qui prient sur lui et tout ce qui a à faire avec lui: ceux qui m'ont appris à parler, m'ont construit mes mains, ceux qui ont travaillé pour faire ce pain; il y a là dedans toutes les générations et le monde entier. Ce pain devient la présence éternelle de Dieu dans le "concentré" de toute la création, y compris l'activité humaine.

N'est-ce pas quelque chose de grand et de sublime?
Nous sommes à la porte du Paradis. Le silence de l'assemblée qui accompagne mes paroles (même les plus effrontés présents dans l'église, dont personne ne peut fermer la bouche, se taisent en ce moment) , ce grand silence exprime que nous avons au moins compris de ne plus nous trouver sur la terre mais plut8t dans l'au-delà.

Merci, Jésus-Christ: Tu nous rends présents à Toi-même avec notre corps qui nous pousse au péché. Gloire à Toi, Jésus-Christ, qui te mets dans nos mains comme un pain pour transformer notre vie dans la tienne par l'intérieur et pour faire en sorte que le Père, en nous regardant, te voie Toi.
Gloire à Toi: Tu comprends ce que nous ne comprenons pas et cela vaut mieux; nous pouvons ainsi avoir confiance entièrement et seulement en Toi.

LE SANG

Certains prêtres, parmi ceux qui sont véritablement saints, lorsqu'ils arrivent au moment de dire "Ceci est mon Corps" éprouvent un coup au cœur: ils sentent que, d'une façon inexplicable, ce "mon" concerne aussi leur propre corps. Et ils ont honte de le dire parce qu'ils savent que personne ne les a crucifiés mais d'autre part ils sentent que cela est vrai car eux aussi sont des consacrés et avec Jésus-Christ ils ne forment qu'un.
Quand je prononce ces mots, je suis convaincu que personne ne peut penser cela de moi sinon je rougirais vraiment sachant que mon corps est bien nourri et n'est ni "offert" ni brisé par personne.

Je prends dans mes mains ce pain et je le lève: "Regardez-le tous". Vous voyez, c'est du pain: Dieu se rend capable d'être mangé par nous. Auparavant j'avais tendu mes mains sur ce pain en invoquant l'Esprit, cet Esprit qui donne la vie et la renouvelle. Je n'ai rien vu mais je sais que cette obéissance à Jésus, ce geste simple avec une parole qui n'est pas à moi, a obligé Dieu à créer. Regardez ce pain: Dieu a agi sur lui, il ne vient plus de la terre, il vient maintenant du ciel. Je m'agenouille.
Que pourrais-je faire d'autre?
Je devrais disparaître comme Jésus a "disparu". Sa présence maintenant est tellement cachée que seule la foi peut la contempler et seul l'amour peut s'en rassasier. Celui qui ne croit pas et qui n'aime pas en ce moment de la Messe doit penser que nous sommes tous fous. C'est vrai. Nous sommes fous de la folie de Dieu.
Je prends le calice. Et la même chose se produit.
On m'a demandé ce que je sens à ce moment-là. Je ne sens rien. Mais il n'est pas nécessaire de sentir Dieu. Ce n'est pas ma tâche. Si je ne sens rien cela ne signifie pas qu'il n'arrive rien. Je ne sens rien mais je sais que mes gestes sont une obéissance à Jésus. Je sais que c'est lui qui agit. Cela me suffit pour croire que le calice que j'ai entre mes mains c'est un don de Dieu, le don le plus nécessaire à tout homme qui naît. Tout homme naît avec une tare qui remonte aux générations d'un passé extrêmement lointain. Une tare qui, comme une force cachée, pousse à voir en Dieu un rival, un ennemi. Une tare qui porte au péché.
Et celui qui est tombé dans le péché comment peut-il rétablir un rapport avec soi-même et avec le Père de tous? Chaque péché est tellement intime, il pénètre si profondément toute la personne qu'il semble avoir empoisonné le sang; il l'a même vraiment empoisonné.
En effet, si nous vivons constamment dans le péché, notre visage aussi change tellement qu'on peut lire le péché sur notre front, on ne peut plus le cacher, comme Chain.
Comment purifier le "sang"? Le peuple juif connaissait cet effet du péché et savait qu'il fallait purifier le sang (la vie); ils remplaçaient leur propre sang par celui d'animaux coûteux, ils le versaient sur l'autel pour signifier qu'ils remettaient de nouveau leur vie à Dieu, repentis de l'avoir abandonné.

Mais le sang d'animaux est toujours un sang d'animaux, tellement peu représentatif qu'il en faut continuellement ...

Le sang du Fils est plus précieux que le notre. Il est agréé par Dieu. Le sang du Fils dans nos mains et dans nos veines force le Père à avoir pour nous un regard nouveau car il voit en nous la "vie" de son Fils; Il nous voit tellement intimement liés à son Fils que notre chair de péché devient la source d'une miséricorde plus grande. Le sang du Fils crée ainsi une alliance nouvelle et éternelle avec le Père.
La première alliance était vite rompue. Il suffisait un péché de l'homme et l'engagement de Dieu à son égard n'était plus valable. La nouvelle alliance personne ne peut la rompre, pas même avec le péché car Dieu voit dans nos mains et notre corps le sang de son Fils. Dieu ne rompt plus sa nouvelle alliance tant que ce sang, la vie de Jésus est en nous. C'est pourquoi "celui qui croit dans le Fils aura la vie" peut nous dire Jésus.

SACRIFICE ET CALICE

Encore un mot sur la Consécration. J'ai déjà dit que l'on n'arrive pas à tout dire ... et c'est vrai. Cependant je veux m'arrêter un instant encore sur deux mots que nous employons fréquemment et dont le sens risque d'être ignoré.
Le premier est "sacrifice".

La Messe est un sacrifice. "Ceci est mon Corps offert en sacrifice pour vous".
Nous avons l'habitude de donner à ce mot le sens de quelque chose qui nous conte et dont nous nous passerions volontiers.
Les juifs qui employaient le mot correspondant exprimaient par celui-ci l'action de s'approcher, d'aller tout près. "S'approcher de Dieu!". Ils pensaient, ils désiraient de tout leur être de S'approcher de Lui et ils cherchaient les moyens pour le faire. Ils ont trouvé les moyens que nous connaissons: chanter ses louanges, raconter ses prodiges, brûler des animaux sur l'autel en pierre, verser du vin et de la farine autour de l'autel, faire l'aumône, etc. Moyens louables s'ils sont l'expression d'un cœur sincère et aimant: Dieu accepte volontiers le sacrifice d'un "cœur repenti et humilié".

Mais ce n'est pas difficile de devenir hypocrites: en faisant des offrandes considérables, en achetant des animaux gros et gras pour les brûler sur l'esplanade du Temple, et cela sans changer le cœur. L'hypocrisie attire la colère de Dieu!

Nous nous rendons compte que l'homme qui désire "s'approcher de Dieu" n'est pas même en mesure de faire un pas si Dieu ne lui en montre la direction.

Même si tu faisais des actions héroïques... comment savoir si elles te présentent à Dieu? Au fond, chaque initiative que nous prenons est tachée d'égoïsme ... et l'égoïsme ne nous rapproche pas de Dieu.
Voilà qu'à ce point Dieu même prend l'initiative. "Je suis la voie" dit Jésus. En Jésus Christ tu rencontres Dieu.
Il "est passé de ce monde au Père" dit St. Jean: il a réalisé le véritable "rapprochement", le vrai sacrifice.
Sa mort (son corps offert) est le sacrifice unique. Si tu rencontres moyennant la foi Jésus Christ, tu es auprès de Dieu, tu es déjà à Dieu! "Mangez tous!": c'est le moyen de réaliser le sacrifice de rencontrer Dieu. C'est un moyen simple, qui ne coûte pas. Mais oui, cela te coûte; il n'est pas question de te dépouiller d'abord de tes richesses ou d'accomplir des actions héroïques, mais il s'agit de te débarrasser de ton orgueil, du désir de te vanter devant Dieu, de vouloir être quelqu'un. Il s'agit de devenir si petit jusqu'à croire que Dieu veut te rencontrer quand tu manges un morceau de pain avec les autres. C'est le morceau qui touche ton cœur.

L'autre mot que nous employons et dont le sens est plus profond que ce qu'il peut sembler c'est "calice".
Quand la mère de Jacques et Jean demanda à Jésus que ses deux fils eussent la possibilité de s'asseoir à sa droite et à sa gauche, il leur demanda: "Pouvez-vous boire le calice que je boirai?".
Boire le calice de quelqu'un cela ne signifie pas déglutir une gorgée de liquide ... mais partager son sort, s'associer à son bonheur comme à son malheur ...
Quand je vais au bistrot et je trouve quelqu'un heureux car il a acheté une voiture ou parce qu'il a eu un enfant, il veut partager sa joie et il m'invite à boire.
Je rentre dans la maison d'un mort; les parents voient que je partage leur douleur: ils m'offrent quelque chose à boire. Je bois à leur calice: boire est seulement un petit signe que je participe à leur joie, à leur douleur, à leur vie. Une participation qui augmente la joie ou soulage la douleur.

Boire au calice de Jésus-Christ signifie participer à sa mort et à sa résurrection. Participation à son amour qui arrive jusqu'à se donner entièrement sans plus regarder à son propre intérêt.

Boire au calice de Jésus avec les autres cela signifie savoir que ma vie et mes richesses, mes joies et mes douleurs ne sont plus seulement à moi: elles sont à Dieu et tous peuvent s'en servir.

Ma vie doit servir aux fins de Dieu. Je n'ai plus rien de privé si ce n'est pour grandir en cette dimension d'amour universel, d'amour divin.

MYSTERE ET FOI

"Mystère de la foi". Je le dis à haute voix comme si je voulais me rappeler que ce que je suis en train de célébrer, c'est-à-dire toute la Messe est fondée et se déroule aux niveaux les plus profonds et lumineux de mon existence: au niveau de ma rencontre avec Dieu. Je me trouve dans la situation d'Adam au Paradis terrestre, avant son péché. Selon le langage biblique il "se promenait avec Dieu". Je suis en train de vivre des actions de foi. Le foi n'est pas de l'obscurité, c'est une lumière jaillissant au-delà de l'intelligence. Le mystère de la foi ce n'est pas une ténèbres dense: c'est au contraire la connaissance de Dieu c'est la possibilité de voir le dessein dl amour de Dieu, si beau et si intelligent qu'on peut le comprendre seulement par la foi en restant à son coté avec confiance et simplicité.

Tes cotes et ton épine dorsale tu peux les voir seulement à l'aide de la lumière des rayons "X". Pour voir les pensées de Dieu et ses actions les plus grandes, celles qui soutiennent le monde de ta vie éternelle, il te faut la "lumière" de la foi.
La foi connaît les mystères de Dieu. L'amour les vit. Même la foi de Satan connaît les mystères de Dieu et c'est tellement vrai qu'il ne veut même pas les entendre nommer. Ta foi, soutenue par l'amour, les proclame maintenant à haute voix, avec force: "Nous annonçons ta mort, Seigneur, nous proclamons ta résurrection en attendant ta venue".

Par ces mots, ta foi cachée se révèle: tu proclames le sens le plus profond non seulement de la Messe à laquelle tu participes, mais aussi de toute ta vie qui est à présent plongée dans la Messe: le sens de ta vie dans le dessein de Dieu. Sais-tu quel est-ce?
Chrétien, ta vie est pour l'annonce et l'attente. Chaque jour ta foi, celle que tu vis, annonce l'amour et la rédemption de Dieu pour tous les Hommes en Jésus-Christ, et chaque jour tu attends (avec joie?) ton Sauveur, celui qui est devenu le premier en toi. Ne te dérobe pas à ces mots: petit à petit ils graveront ton intérieur jusqu'à le faire émerger sur les égoïsmes et les passions de ton corps destiné à la terre.
Ta vie aussi participe au mystère de la foi: ce n'est pas une vie qui termine au cimetière ou qui, chaque jour, s'achève sous les couvertures; ta vie se déroule devant Dieu: tu peux la voir et la comprendre seulement à la lumière de la foi.
De quelle foi? De la tienne? Rappelle-toi: les démons aussi ont "une foi". Ne t'y laisse pas prendre.
Nous voulons posséder et être possédés seulement par la foi de l'Eglise, héritage des Apôtres; c'est une foi plus grande, plus forte, plus sainte, plus sûre que la "mienne".
C'est une grosse illusion que de vouloir avoir une foi à soi... elle est certainement limitée et conditionnée par nos vices, notre ignorance, notre orgueil et notre incrédulité.
Tu vois combien les paroles de la Messe - les tiennes et les miennes - sont chargées de vie! Le temps de la Messe n'est pas suffisant pour en saisir tout le sens et la valeur!
Après l'acclamation, pendant que tu gardes de nouveau le silence, je commence une série de "Prières" ou de "discours" avec le Père. Un remerciement avant tout, et le remerciement n'est pas fait de paroles mais d'une attitude du cœur: "Nous t'offrons ce sacrifice vivant et saint". C'est un sacrifice saint parce qu'il vient de Dieu-même. C'est la vie de son Fils unique. C'est un sacrifice vivant pour la même raison mais aussi parce qu'en lui il y a ma présence et la tienne; en offrant au Père son Fils, Jésus, je m'offre moi-même qui suis lié au Fils pour toujours par mon Baptême et ensuite - dois-je te le dire? - je lui offre ta vie: étant ton pasteur et père ... je sens que je peux et que je dois le faire.

L'ESPRIT ET L'EGLISE

Parmi les prières que je récité après la Consécration, il y en a une qui a un nom difficile: "Epiclèse". Comme tu peux imaginer, c'est un mot grec: "invocation". C'est l'invocation à l'Esprit Saint afin qu'il opère une transformation. Je l'ai invoqué, les mains tendues, sur le pain et sur le vin pour leur transformation dans le Corps et le Sang du Seigneur; maintenant je l'invoque aussi sur nous tous: nous aussi avons besoin de la même transformation: au lieu d'être séparés, éloignés et parfois même ennemis, nous devons devenir "un seul corps et un seul esprit", nous sommes destinés à devenir nous aussi "le Corps et le Sang" du Christ.
Cette prière a été tenue pour très importante depuis toujours. Mais, j'ajoute, plus que la prière, ce qui est important c'est son exaucement. Que serions-nous si nous n'étions pas renouvelés par l'Esprit du Seigneur? Chaque jour nous voyons ce que nous sommes: c'est pour cela que chaque jour nous invoquons l'Esprit de Dieu pour que, en mangeant le pain et en buvant le vin transformés par Lui, notre vie personnelle et notre vie ensemble puissent être transformées.

Nous qui mangeons le Corps du Seigneur devenons -je dis là une énormité- le Seigneur même: l'Eglise est appelée par St Paul Corps du Christ. Avec Lui nous formons une seule chose, un seul organisme. Nous devrions avoir honte jusqu'à l'invraisemblable de ne pas en être dignes: c'est vrai. Mais d'autre part Lui, Jésus Christ, est digne d'avoir un"corps" vivant pour agir et être présent en ce monde pour l'amour duquel il a affronté la passion et la mort.

C'est l'Eglise le corps qu'il utilise pour transformer ce monde et pour le rendre plus humain (ou plutôt plus divin). S'il n'a pas honte de nous malgré nos p échés et nos infidélités 1 eh bien, tant mieux pour nous (de qui ne devrait il pas avoir honte?)! Il se sert de tout ce qui est faible, pauvre, mesquin, méprisé, il se sert de nous.

C'est bien parce que nous n'avons rien de quoi nous vanter, que dans le bien que par sa grâce nous répandons sous différentes formes et façons, resplendissent seulement sa puissance, sa richesse, sa gloire.
La faiblesse, la fragilité de l'Eglise devient ainsi l'instrument de la gloire de Dieu.

En continuant ma prière je me rappelle justement de cette Eglise. Je prie pour elle en trois directions; avant tout pour les vivants: je demande au Père de conserver dans la foi et dans l'amour le Pape, l'évêque, les prêtres et tous les fidèles. Le Pape et l'évêque je les nomme expressément avec leur nom: ce sont des personnes concrètes avec une date et un lieu de naissance. Dieu se sert d'eux pour moi et pour toi; ce ne sont pas des anges:ils ont besoin du soutien de notre prière et de notre obéissance pour exercer leur rôle avec sérénité, force et, joie.

Je confie ensuite à la clémence de Dieu les défunts que nous avons connus, qui ont vécu avec la foi dans le cœur et dans les oeuvres mais qui, peut-être doivent encore purifier leur esprit avant qu'il soit libre de tout lien terrestre et prêt pour la gloire. Eux-aussi font partie de l'Eglise: vivants ils en ont fait partie et ils jouissent à présent des bénéfices de la prière des frères.

Enfin nous prions pour nous-mêmes et pour nous je demande la chose principale: d'arriver à tenir compagnie aux Saints: Marie, les Apôtres, le Saint Patron et tous les autres. C'est là 1'Eglise stable et définitive, l'assemblée réunie autour du Seigneur pour ne plus s'en séparer: et nous regardons dès maintenant à ces frères qui , jouissent définitivement de l'amour parfait de Dieu car nous avons déjà été appelés et avons déjà fait les premiers pas pour les rejoindre, pour entrer dans la "Jérusalem céleste".

L'Eucharistie que nous mangeons est justement la nourriture qui donne la force pour ce chemin.

PERE

Dans notre réflexion, nous sommes arrivés à la prière de "Notre Père". C'est celle qui a été prononcée la première fois par les lèvres de Jésus. Personne n' est digne de la répéter. Si nous le faisons c'est pour obéir à Lui, à Jésus, et parce que nous savons que le Père est content que ses fils lui adressent la parole. C'est pourquoi "Obéissants... nous osons dire: Notre Père ...

Chaque mot de cette prière a un poids et un sens aux dimensions infinies. Le nom de "Père" est un terme pris de notre expérience humaine. C'est ainsi que nous nous adressons au Dieu du ciel et de la terre. Et avec ce nom nous éliminons les éventuelles distances, injustement créées par nos philosophies et idéologies, entre l'homme et Dieu.

Le mot "Père" nous rappelle l'engagement que Dieu a pris avec nous: un engagement d'amour, d'amour ... anticipé, . Oui, il nous aime avant même que nous le remercions. Il nous aime alors que nous sommes encore des pécheurs, exactement comme un papa aime son enfant avant qu'il naisse, avant d'en avoir la reconnaissance. En appelant Dieu par le nom de "Père" nous gardons le respect pour lui (nous ne l'appelons pas par son nom comme nous n'appelons pas par son nom notre papa: ce serait un signe d'égalité) et en même temps nous ouvrons notre cœur à une confiance affectueuse qui nous permet de nous abandonner à sa volonté et à ses désirs.

Vis-à-vis du Père, avec la confiance en Lui, naît aussi l'honnêteté envers ses autres enfants: je dois les reconnaître comme des frères pour que je puisse dire "Notre Père". Je suis seulement un de ses enfants, un membre de sa famille par laquelle je suis aidé et dans laquelle je suis co-responsable.

C'est pour cela que la prière de "Notre Père" est très engageante soit au point de vue individuel qu'au point de vue social. Elle met sur mes épaules les besoins, les souffrances, les vicissitudes de tous les autres pour que je les porte avec eux. Je ne m'étonne donc pas que beaucoup ne prient plus ou, s'ils prient, qu'ils n'arrivent pas à s'arrêter quinze minutes pour répéter ou méditer les mots de cette prière: ils sont trop compromettants.

"Que ton Règne vienne". Je dois être disponible pour que toi, Père, dictes tes lois à mes pensées et à mes actions, pour que tu règnes sur moi.

"Donne-nous aujourd'hui ..." le pain qui nous est nécessaire pour aujourd'hui! Nous ne pouvons pas demander à Dieu de nous enrichir. Que faire de tas d'argent si cette nuit je dois mourir? Je demande par contre "notre" pain: ce que j'ai hl est pas seulement à moi. Si je voulais en jouir tout seul je serais malhonnête avec le Père auquel j'ai demandé "notre" pain et qui ne m'a pas donné du pain à moi mais le pain "à nous".

Je suis conscient aussi que l'homme ne vit pas seulement de pain, qu'il ne veut pas arriver seulement au cimetière, mais que pour sa vie éternelle il a bien besoin d'un pain, le pain de la vie: sagesse, foi, amour, pardon, paix,... l'Esprit Saint: c'est ce que je demande également chaque jour!

"Remets-nous nos dettes". Et pas seulement les miennes; je demande pardon aussi pour les autres: qui sait combien je suis moi-aussi complice des erreurs et de la tiédeur des autres!
Je ne les accuse pas pour ne pas m'accuser aussi. Je les pardonne généreusement afin que je puisse aussi être pardonné par Dieu qui emploie envers moi la même mesure que j'emploie pour mes frères: "ainsi que nous pardonnons...".

"Ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du Mauvais". Toute tentation vient du Mauvais, ennemi de Dieu et de l'homme.
Pour le tentateur c'est une embûche, pour l'homme la tentation devient une preuve de son amour pour le Père. Par les preuves l'homme peut montrer à Dieu qu'il l'aime vraiment au-dessus de tous et de soi-même aussi.

LA PEUR ET LA PAIX

La peur est une mauvaise conseillère et une mauvaise compagne de voyage. Personne ne voudrait avoir peur ... mais il arrive très souvent de rencontrer des gens qui disent: "J'ai peur".

Tu peux avoir peur des choses, des évènements déjà survenus, des vicissitudes qui t'attendent, des responsabilités que tu as assumées ou que tu vas assumer et tu peux aussi avoir peur de quelqu'un (même dans ta famille), tu peux avoir peur de toi-même.

D'où vient cette chose étrange qui est la peur. Certainement pas de Dieu. La peur ne peut pas venir de Dieu qui est Père, qui est Amour. De Lui vient la sérénité, la sécurité, la paix.

La peur, qui est un mal, vient du Mal. Le Mal - avec la lettre majuscule - que l'on appelle Diable ou Satan, fait peur parce qu'il veut dominer l'homme et qu'il ne peut le faire sinon par la peur tandis que Dieu se fait suivre moyennant l'amour (en cela le Mauvais ne sait pas imiter Dieu).

Voilà pourquoi à la Messe nous supplions Dieu afin qu'il nous délivre de tout mal, parce que nous n'aimons pas la peur.
"Avec ton aide nous serons délivrés de tout trouble". Certainement. Si nous nous mettons avec confiance sous le regard du Père, si nous faisons le "saut" de nous fier de Lui, notre âme commencera à vivre dans la paix, à jouir de la sérénité. Et cela surtout si nous serons "libres de tout péché" qui est le mal le plus indiqué pour enlever de notre cœur la joie, la confiance, la paix.
L'assemblée aussi ratifie ma prière avec l'acclamation "à Toi le royaume, à Toi la puissance..". C'est un acte de foi: "Tu peux nous délivrer du péché et du mal car personne ne peut vaincre ta puissance. Tu es plus fort que toute autre force si seulement nous permettons que tu emploies pour nous".
Une autre prière pour l'unité et pour la paix de l'Eglise nous introduit à l'échange d'un geste de paix. Nous demandons la paix: celle de Jésus Christ! La paix du Seigneur ne consiste pas en un manque de guerre ou de querelle, c'est bien plus.
Sa paix est l'échange de ses dons: ce qu'il a il nous le donne: voilà sa paix! La paix dont nous jouissons avec nos frères c'est aussi la jouissance que l'un a des richesses de l'autre: "ce qui est à moi est à toi aussi; jouis avec moi de ce dont je jouis". La paix est participation, copartage, communion.
Jésus fait la paix avec nous en se donnant soi même. Nous donnons la main au voisin et nous la retirons aussitôt: évidemment à l'église on ne peut ni on doit faire plus. C'est seulement un geste de paix. Mais ce geste ne doit pas rester seulement un signe, il doit être signe de la paix véritable que nous voulons faire rayonner le long de toute la semaine.
C'est le signe de ma volonté de partager avec tous les dons de Dieu: la foi, la prière, les expériences, les choses matérielles, parce que nous
sommes déjà une seule famille, celle de Dieu..

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