JE VAIS A LA MESSE 3 LA VIE DANS LE PAIN Je ne sais pas comment commenter la partie centrale de la Messe, celle
de la Consécration. Si j'essaie d'expliquer mot par mot je n'en finis
plus. Si je veux être complet je dois me taire tout à fait car un homme
ne peut comprendre pleinement le mystère que nous célébrons et moi moins
encore car non seulement je suis un homme, mais je suis aussi un grand
pécheur. Une nouvelle création se produit. La Parole de Dieu crée. Ce qui m'étonne et qui pourtant est sage, saint et beau c'est que cette Parole de Dieu puisse aujourd'hui sortir de mes lèvres et se poser sur un peu de pain qui est déjà là tout prêt. Cela m'étonne car moi je suis ce que je suis, le pain est ce qu'il est et Dieu pourrait faire davantage et mieux; mais il me semble savant et beau que Dieu se serve de sa création rebelle et déchue, faite de matière qui se corrompt, pour l'œuvre la plus grande qui existe, pour une oeuvre tellement spirituelle qui touche et "l'emprisonne" Dieu-même. Ainsi ce pain non seulement change de valeur mais aussi mes main-à qui le touchent, mes lèvres qui prient sur lui et tout ce qui a à faire avec lui: ceux qui m'ont appris à parler, m'ont construit mes mains, ceux qui ont travaillé pour faire ce pain; il y a là dedans toutes les générations et le monde entier. Ce pain devient la présence éternelle de Dieu dans le "concentré" de toute la création, y compris l'activité humaine. N'est-ce pas quelque chose de grand et de sublime? Merci, Jésus-Christ: Tu nous rends présents à Toi-même avec notre corps
qui nous pousse au péché. Gloire à Toi, Jésus-Christ, qui te mets dans
nos mains comme un pain pour transformer notre vie dans la tienne par
l'intérieur et pour faire en sorte que le Père, en nous regardant, te
voie Toi. LE SANG Certains prêtres, parmi ceux qui sont véritablement saints, lorsqu'ils
arrivent au moment de dire "Ceci est mon Corps" éprouvent un
coup au cœur: ils sentent que, d'une façon inexplicable, ce "mon"
concerne aussi leur propre corps. Et ils ont honte de le dire parce qu'ils
savent que personne ne les a crucifiés mais d'autre part ils sentent que
cela est vrai car eux aussi sont des consacrés et avec Jésus-Christ ils
ne forment qu'un. Je prends dans mes mains ce pain et je le lève: "Regardez-le tous".
Vous voyez, c'est du pain: Dieu se rend capable d'être mangé par nous.
Auparavant j'avais tendu mes mains sur ce pain en invoquant l'Esprit,
cet Esprit qui donne la vie et la renouvelle. Je n'ai rien vu mais je
sais que cette obéissance à Jésus, ce geste simple avec une parole qui
n'est pas à moi, a obligé Dieu à créer. Regardez ce pain: Dieu a agi sur
lui, il ne vient plus de la terre, il vient maintenant du ciel. Je m'agenouille.
Mais le sang d'animaux est toujours un sang d'animaux, tellement peu représentatif qu'il en faut continuellement ... Le sang du Fils est plus précieux que le notre. Il est agréé par Dieu.
Le sang du Fils dans nos mains et dans nos veines force le Père à avoir
pour nous un regard nouveau car il voit en nous la "vie" de
son Fils; Il nous voit tellement intimement liés à son Fils que notre
chair de péché devient la source d'une miséricorde plus grande. Le sang
du Fils crée ainsi une alliance nouvelle et éternelle avec le Père. SACRIFICE ET CALICE Encore un mot sur la Consécration. J'ai déjà dit que l'on n'arrive pas
à tout dire ... et c'est vrai. Cependant je veux m'arrêter un instant
encore sur deux mots que nous employons fréquemment et dont le sens risque
d'être ignoré. La Messe est un sacrifice. "Ceci est mon Corps offert en sacrifice
pour vous". Mais ce n'est pas difficile de devenir hypocrites: en faisant des offrandes considérables, en achetant des animaux gros et gras pour les brûler sur l'esplanade du Temple, et cela sans changer le cœur. L'hypocrisie attire la colère de Dieu! Nous nous rendons compte que l'homme qui désire "s'approcher de Dieu" n'est pas même en mesure de faire un pas si Dieu ne lui en montre la direction. Même si tu faisais des actions héroïques... comment savoir si elles te
présentent à Dieu? Au fond, chaque initiative que nous prenons est tachée
d'égoïsme ... et l'égoïsme ne nous rapproche pas de Dieu. L'autre mot que nous employons et dont le sens est plus profond que ce
qu'il peut sembler c'est "calice". Boire au calice de Jésus-Christ signifie participer à sa mort et à sa résurrection. Participation à son amour qui arrive jusqu'à se donner entièrement sans plus regarder à son propre intérêt. Boire au calice de Jésus avec les autres cela signifie savoir que ma vie et mes richesses, mes joies et mes douleurs ne sont plus seulement à moi: elles sont à Dieu et tous peuvent s'en servir. Ma vie doit servir aux fins de Dieu. Je n'ai plus rien de privé si ce n'est pour grandir en cette dimension d'amour universel, d'amour divin. MYSTERE ET FOI "Mystère de la foi". Je le dis à haute voix comme si je voulais me rappeler que ce que je suis en train de célébrer, c'est-à-dire toute la Messe est fondée et se déroule aux niveaux les plus profonds et lumineux de mon existence: au niveau de ma rencontre avec Dieu. Je me trouve dans la situation d'Adam au Paradis terrestre, avant son péché. Selon le langage biblique il "se promenait avec Dieu". Je suis en train de vivre des actions de foi. Le foi n'est pas de l'obscurité, c'est une lumière jaillissant au-delà de l'intelligence. Le mystère de la foi ce n'est pas une ténèbres dense: c'est au contraire la connaissance de Dieu c'est la possibilité de voir le dessein dl amour de Dieu, si beau et si intelligent qu'on peut le comprendre seulement par la foi en restant à son coté avec confiance et simplicité. Tes cotes et ton épine dorsale tu peux les voir seulement à l'aide de
la lumière des rayons "X". Pour voir les pensées de Dieu et
ses actions les plus grandes, celles qui soutiennent le monde de ta vie
éternelle, il te faut la "lumière" de la foi. Par ces mots, ta foi cachée se révèle: tu proclames le sens le plus profond
non seulement de la Messe à laquelle tu participes, mais aussi de toute
ta vie qui est à présent plongée dans la Messe: le sens de ta vie dans
le dessein de Dieu. Sais-tu quel est-ce? L'ESPRIT ET L'EGLISE Parmi les prières que je récité après la Consécration, il y en a une
qui a un nom difficile: "Epiclèse". Comme tu peux imaginer,
c'est un mot grec: "invocation". C'est l'invocation à l'Esprit
Saint afin qu'il opère une transformation. Je l'ai invoqué, les mains
tendues, sur le pain et sur le vin pour leur transformation dans le Corps
et le Sang du Seigneur; maintenant je l'invoque aussi sur nous tous: nous
aussi avons besoin de la même transformation: au lieu d'être séparés,
éloignés et parfois même ennemis, nous devons devenir "un seul corps
et un seul esprit", nous sommes destinés à devenir nous aussi "le
Corps et le Sang" du Christ. Nous qui mangeons le Corps du Seigneur devenons -je dis là une énormité- le Seigneur même: l'Eglise est appelée par St Paul Corps du Christ. Avec Lui nous formons une seule chose, un seul organisme. Nous devrions avoir honte jusqu'à l'invraisemblable de ne pas en être dignes: c'est vrai. Mais d'autre part Lui, Jésus Christ, est digne d'avoir un"corps" vivant pour agir et être présent en ce monde pour l'amour duquel il a affronté la passion et la mort. C'est l'Eglise le corps qu'il utilise pour transformer ce monde et pour le rendre plus humain (ou plutôt plus divin). S'il n'a pas honte de nous malgré nos p échés et nos infidélités 1 eh bien, tant mieux pour nous (de qui ne devrait il pas avoir honte?)! Il se sert de tout ce qui est faible, pauvre, mesquin, méprisé, il se sert de nous. C'est bien parce que nous n'avons rien de quoi nous vanter, que dans
le bien que par sa grâce nous répandons sous différentes formes et façons,
resplendissent seulement sa puissance, sa richesse, sa gloire. En continuant ma prière je me rappelle justement de cette Eglise. Je prie pour elle en trois directions; avant tout pour les vivants: je demande au Père de conserver dans la foi et dans l'amour le Pape, l'évêque, les prêtres et tous les fidèles. Le Pape et l'évêque je les nomme expressément avec leur nom: ce sont des personnes concrètes avec une date et un lieu de naissance. Dieu se sert d'eux pour moi et pour toi; ce ne sont pas des anges:ils ont besoin du soutien de notre prière et de notre obéissance pour exercer leur rôle avec sérénité, force et, joie. Je confie ensuite à la clémence de Dieu les défunts que nous avons connus, qui ont vécu avec la foi dans le cœur et dans les oeuvres mais qui, peut-être doivent encore purifier leur esprit avant qu'il soit libre de tout lien terrestre et prêt pour la gloire. Eux-aussi font partie de l'Eglise: vivants ils en ont fait partie et ils jouissent à présent des bénéfices de la prière des frères. Enfin nous prions pour nous-mêmes et pour nous je demande la chose principale: d'arriver à tenir compagnie aux Saints: Marie, les Apôtres, le Saint Patron et tous les autres. C'est là 1'Eglise stable et définitive, l'assemblée réunie autour du Seigneur pour ne plus s'en séparer: et nous regardons dès maintenant à ces frères qui , jouissent définitivement de l'amour parfait de Dieu car nous avons déjà été appelés et avons déjà fait les premiers pas pour les rejoindre, pour entrer dans la "Jérusalem céleste". L'Eucharistie que nous mangeons est justement la nourriture qui donne la force pour ce chemin. PERE Dans notre réflexion, nous sommes arrivés à la prière de "Notre Père". C'est celle qui a été prononcée la première fois par les lèvres de Jésus. Personne n' est digne de la répéter. Si nous le faisons c'est pour obéir à Lui, à Jésus, et parce que nous savons que le Père est content que ses fils lui adressent la parole. C'est pourquoi "Obéissants... nous osons dire: Notre Père ... Chaque mot de cette prière a un poids et un sens aux dimensions infinies. Le nom de "Père" est un terme pris de notre expérience humaine. C'est ainsi que nous nous adressons au Dieu du ciel et de la terre. Et avec ce nom nous éliminons les éventuelles distances, injustement créées par nos philosophies et idéologies, entre l'homme et Dieu. Le mot "Père" nous rappelle l'engagement que Dieu a pris avec nous: un engagement d'amour, d'amour ... anticipé, . Oui, il nous aime avant même que nous le remercions. Il nous aime alors que nous sommes encore des pécheurs, exactement comme un papa aime son enfant avant qu'il naisse, avant d'en avoir la reconnaissance. En appelant Dieu par le nom de "Père" nous gardons le respect pour lui (nous ne l'appelons pas par son nom comme nous n'appelons pas par son nom notre papa: ce serait un signe d'égalité) et en même temps nous ouvrons notre cœur à une confiance affectueuse qui nous permet de nous abandonner à sa volonté et à ses désirs. Vis-à-vis du Père, avec la confiance en Lui, naît aussi l'honnêteté envers ses autres enfants: je dois les reconnaître comme des frères pour que je puisse dire "Notre Père". Je suis seulement un de ses enfants, un membre de sa famille par laquelle je suis aidé et dans laquelle je suis co-responsable. C'est pour cela que la prière de "Notre Père" est très engageante soit au point de vue individuel qu'au point de vue social. Elle met sur mes épaules les besoins, les souffrances, les vicissitudes de tous les autres pour que je les porte avec eux. Je ne m'étonne donc pas que beaucoup ne prient plus ou, s'ils prient, qu'ils n'arrivent pas à s'arrêter quinze minutes pour répéter ou méditer les mots de cette prière: ils sont trop compromettants. "Que ton Règne vienne". Je dois être disponible pour que toi, Père, dictes tes lois à mes pensées et à mes actions, pour que tu règnes sur moi. "Donne-nous aujourd'hui ..." le pain qui nous est nécessaire pour aujourd'hui! Nous ne pouvons pas demander à Dieu de nous enrichir. Que faire de tas d'argent si cette nuit je dois mourir? Je demande par contre "notre" pain: ce que j'ai hl est pas seulement à moi. Si je voulais en jouir tout seul je serais malhonnête avec le Père auquel j'ai demandé "notre" pain et qui ne m'a pas donné du pain à moi mais le pain "à nous". Je suis conscient aussi que l'homme ne vit pas seulement de pain, qu'il ne veut pas arriver seulement au cimetière, mais que pour sa vie éternelle il a bien besoin d'un pain, le pain de la vie: sagesse, foi, amour, pardon, paix,... l'Esprit Saint: c'est ce que je demande également chaque jour! "Remets-nous nos dettes". Et pas seulement les miennes; je
demande pardon aussi pour les autres: qui sait combien je suis moi-aussi
complice des erreurs et de la tiédeur des autres! "Ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du Mauvais".
Toute tentation vient du Mauvais, ennemi de Dieu et de l'homme. LA PEUR ET LA PAIX La peur est une mauvaise conseillère et une mauvaise compagne de voyage. Personne ne voudrait avoir peur ... mais il arrive très souvent de rencontrer des gens qui disent: "J'ai peur". Tu peux avoir peur des choses, des évènements déjà survenus, des vicissitudes qui t'attendent, des responsabilités que tu as assumées ou que tu vas assumer et tu peux aussi avoir peur de quelqu'un (même dans ta famille), tu peux avoir peur de toi-même. D'où vient cette chose étrange qui est la peur. Certainement pas de Dieu. La peur ne peut pas venir de Dieu qui est Père, qui est Amour. De Lui vient la sérénité, la sécurité, la paix. La peur, qui est un mal, vient du Mal. Le Mal - avec la lettre majuscule - que l'on appelle Diable ou Satan, fait peur parce qu'il veut dominer l'homme et qu'il ne peut le faire sinon par la peur tandis que Dieu se fait suivre moyennant l'amour (en cela le Mauvais ne sait pas imiter Dieu). Voilà pourquoi à la Messe nous supplions Dieu afin qu'il nous délivre
de tout mal, parce que nous n'aimons pas la peur. |
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